Grand prix du cinéma sans films au Festival Kinoshock à Anapa, 2007
Synopsis
Dans un train qui la mène vers une destination inconnue, une mère raconte sa vie, dans la Russie d'aujourd'hui, avec ses neufs enfants.
Petite, Lioubov, l'héroïne, a été vendue par sa propre mère pour une bouteille de vodka. Plus tard, elle doit s'occuper seule de ses neuf enfants et veut en adopter un dixième. Elle a fui un mari violent, travaille dans un kolkhoze avec sa fille ainée et se démène pour élever les autres. Émue par un jeune garçon délaissé par sa famille, elle l'accueille pour un temps. Mais malgré son dévouement, elle constate à regret que ses fils ne sont guère différents des hommes qu’elle a connus.
Il n'y a en réalité que deux types de cinéma : celui qui parle d'amour et celui qui parle de haine. "La Mère" appartient au premier". Antoine Cattin et Pavel Kostomarov annoncent d'entrée la couleur. Si l'histoire de cette mère qui élève seule ses neuf enfants dans une campagne russe coupée des réalités du monde moderne laisse augurer d'un récit lugubre, les deux cinéastes évitent avec brio le piège du misérabilisme.
Difficile en effet de rester indifférent à l'énergie de Lioubov ("Amour" en français) et au charme brutal de sa fille aînée Alessia, héritière à la fois fragile et bouillonnante du rôle de tutrice familiale. Autour d'elles gravitent des enfants turbulents, Mourzik, l'adolescent bagarreur et paresseux, Sergueï, amant de passage de la mère, alcoolique et violent, ou encore Génia, futur mari d'Alessia qui révèlera vite un caractère féroce: des hommes médiocres, révélateurs d'une masculinité stérile et sans avenir.
Aussi sombre que soit ce tableau d'enfants prédestinés à la prison ou à l'armée, Antoine Cattin met en lumière l'espoir que suscite cette mère, "superhéroïne de l'amour": "On peut y voir un message positif, avec cette femme qui en dépit des circonstances, continue de faire tourner les choses avec une force et une foi au-delà de tout".
Malgré la difficulté à nourrir "leurs" propres enfants, Lioubov et Alessia débordent de générosité et n'hésitent pas à prendre sous leur aile Sacha, petit garçon délaissé par sa mère, l'un des personnages les plus émouvants du film. Jusqu'au bout, les deux réalisateurs maintiennent une tension palpable, enchaînant les moments de vie stupéfiants, tantôt pathétiques, tantôt truculents.
Pour Antoine Cattin, cet aspect romanesque est primordial: "Ce film relève de la fiction: il y a des caractères, des personnages, un dénouement. c'est très important pour nous d'avoir des sentiments véritables à l'écran". Le souffle de liberté qui traverse "La Mère", s'il peut parfois sembler irréel, imprègne durablement.
Vincent Darbellay/tsrinfo : http://www.tsr.ch/tsr/index.html?siteSect=200001&sid=8989137
Interview d'Antoine Cattin : http://www.tsr.ch/tsr/index.html?siteSect=500010&bcid=577234&vid=8990666&channel=info
Voir aussi : http://www.assochroma.com/Images_jeudis/la%20mere.pdf