Léningrad pendant le blocus. Dans la maison de campagne des Voskressenski, des privilégiés, se retrouvent six personnes et une poule que personne ne sait préparer. Autrefois c'était la cuisinière qui faisait ça mais la veille elle a été retirée aux Vozkressenski : dehors les temps sont durs et dedans la situation n'est pas facile non plus : le fils cadet a amené une jeune fille affamée, la fille aînée un inconnu qu'elle s'apprête à épouser. Il reste quelques minutes avant la nouvelle année et la quantité de problèmes grossit comme une boule de neige.
On s’agite chez les Voskressenski. C’est bientôt l’heure du dîner et rien n’est prêt. Très rapidement, la fête prévue part en vrille. Et pourtant ils ne sont que six : les parents, les deux enfants et deux invités surprise. Le fils amène une petite amie qui a tout de Cosette et la fille présente Vitali, une espèce de malotru rencontré dans des circonstances pas claires. Précisons que nous sommes aux environs de Léningrad ce 31 décembre 1941. Les habitants de la ville assiégée par les Allemands meurent de
froid, de faim et d’épuisement. Mais dans cette maison à part, rien ne manque car le mari travaille pour la défense et a droit à des rations augmentées et une maison chauffée. Réveillon sous les bombes et ambiance délétère.
Ça devrait être une tragédie classique : unités de lieu, de temps
et d’action. Mais c’est une comédie. Noire et iconoclaste. Voire
même de très mauvais goût et sacrilège car ce siège, avec son million de morts, est une page sacrée de l’histoire russe et soviétique. La réaction n’a pas traîné : le film est interdit. On ne crache
pas sur les tombes des martyrs. L’auteur se défend d’une telle accusation. La situation privilégiée du couple et leur indifférence aux malheurs des autres n’est que l’extrapolation d’un fait réel : les wagons spéciaux bourrés de nourriture pour Jdanov et son entourage qui se gobergeaient en ces temps de famine. Timofeï Tribountsev fut le commandant Golovnia qui traquait sans relâche le Capitaine Volkonogov tout juste échappé. Ici, il campe le goinfre Vitali. Et un personnage supplémentaire invisible, la grand-mère capricieuse. Françoise Navailh