Pérekop, verrou de la Crimée en novembre 1920. La Guerre Civile fait rage en Russie depuis trois ans. C’est l’ultime combat entre les belligérants : Rouges, Blancs, anarchistes, bande incontrôlées… La Première armée rouge de cavalerie hérite, par hasard, d’une caméra Debrie. On confie au soldat Andreï Nekrassov, photographe dans le civil, la mission de filmer du haut d’un avion les lignes ennemies. Il est accompagné d’Ivan Kariakine, un bolchevik bougon et soupçonneux. Le tandem va vivre des péripéties mouvementées et tragicomiques en passant involontairement d’un camp à un autre.
A partir d’un thème banal et obligatoire, prévu pour le 50ième anniversaire de la Révolution d’Octobre, grâce au scénario subtil de Dounski et Fried, Karelov a réalisé un film atypique tout en nuances sous des dehors faussement simples. A l’image du titre qui renvoie à une chanson traditionnelle de soldat. Rien de grandiloquent mais une émotion sincère.et une épaisseur humaine certaine.
Une brochette d’acteurs, tous plus talentueux les uns que les autres, incarnent avec justesse les protagonistes. En tête de la distribution, Oleg Yankovski dont c’est le premier film. Il est ici aussi solaire qu’il sera sombre et tourmenté dans les films de Tarkovski (« Le Miroir », « Nostalghia »). Il est flanqué de Bykov, le petit sec nerveux. On trouve également dans un rôle épisodique mais frappant Nikolaï Bourliaev qui fut chez Tarkovski Ivan dans « L’Enfance d’Ivan » et fondeur de cloches dans « Andreï Roublev ». Sans oublier le savoureux Papanov en sosie de Boudienny et Demidova, commissaire intransigeante.
Enfin Vladimir Vyssotski joue un officier blanc, un perdant magnifique qui livre son dernier combat avant l’exil sans retour.
22,5 millions de spectateurs en 1969.