Nous avons un rayon d’action très large

Interview de Grigori GEVORKIAN
Directeur général de la société SOVEXPORTFILM

 

Propos recueillis par Elena Kvassova-Duffort, Moscou, août 2009


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Biographie : Grigori Keropovitch Gevorkian est diplômé de la faculté économique de l’Institut national du cinéma (VGIK). Immédiatement après son service militaire il a travaillé chez SOVEXPORTFILM [société chargée de la promotion du cinéma soviétique à l’étranger]. De 1980 à 1984, il a été représentant de SOVEXPORTFILM au Yémen et de 1986 à 1992, chef de bureau de SOVEXPORTFILM en Inde. Depuis 1995, il est Directeur général de SOVEXPORTFILM.
Décoration : Travailleur émérite de la culture de la Fédération de Russie.



Laissez nous d’abord présenter la société SOVEXPORTFILM que certains de nos lecteurs ne connaissent peut-être pas.
SOVEXPORTFILM a été créé en 1945 sur la base d'INTORGKINO qui existait depuis 1924. L'activité principale de SOVEXPORTFILM pendant la période soviétique était le commerce des films, ainsi que la promotion du cinéma soviétique à l'étranger et la fabrication de supports publicitaires. Dans les années 80, SOVEXPORTFILM était l’une des entreprises les plus profitables dans le secteur du commerce extérieur en Union Soviétique. En 1989, après la suppression du monopole d'État sur le commerce extérieur, SOVEXPORTFILM a perdu son droit exclusif d'achat et de vente de films à l’étranger. Ensuite, la société a fait l’objet de projets de privatisation et d’un éventuel changement de type d’activité. Quelle est la situation de votre société aujourd'hui ?


C’est exact, pendant la période soviétique nous faisions du commerce et étions les monopolistes dans le domaine de l'exportation et de l'importation de films. En plus, nous étions chargés de la promotion des films soviétiques à l’étranger, y compris avec un but commercial. L’ancien SOVEXPORTFILM soviétique disposait de moyens, peut-être pas illimités, mais immenses. Nous étions entièrement financés par l'État mais les bénéfices générés par la société revenaient à l’Etat. Ces bénéfices étaient significativement supérieurs à ce que l’Etat nous donnait. Et je ne parle pas du fait que les films que nous achetions à l’étranger rapportaient beaucoup d’argent quand ils étaient montrés en salles. Cela fonctionnait de la façon suivante : SOVEXPORTFILM achetait un film étranger et le revendait à la distribution nationale qui, en tant que propriétaire, sortait le film en salles en récoltant des profits très importants. On pourrait citer comme exemple les films indiens, dont le prix d'achat était très bas et dont la popularité en Union Soviétique était immense, particulièrement dans le Caucase, en Transcaucasie, en Asie centrale… Le film indien qui a rapporté le plus d’argent a été La Vengeance et la loi [Sholay, 1975, de Ramesh Sippi/Ramesh Sippy], il a rassemblé dans les salles soixante millions de spectateurs, c'est-à-dire qu’il a récolté de trente à soixante millions de roubles. Bien sûr cela a été un cas exceptionnel. Mais même un film ordinaire pouvait rapporter de vingt à trente millions. Globalement, le film étranger qui a le mieux marché en Union Soviétique a été le film Yesenia [1971, d’Alfredo B. Crevenna]. Et le film russe qui a connu le plus grand succès a été Les Pirates du vingtième siècle. Nous avons beaucoup travaillé avec ce film à l'étranger.

Il est tout à fait normal qu'après la suppression du monopole du commerce extérieur et la reconnaissance du droit d'auteur dans le domaine cinématographique, le droit de vendre des films ait été attribué aux studios producteurs. Mais dans ces années-là, le véritable commerce des films n’existait plus, car l’industrie cinématographique, et l'économie du pays dans son ensemble ne produisaient plus rien. C'est-à-dire que l’on produisait des films, que personne ne regardait, parce qu’à cette époque le cinéma n’était pas considéré comme un art, mais comme un outil de blanchiment d'argent. Non seulement les spectateurs étrangers, mais aussi nos propres spectateurs se sont peu à peu déshabitués du cinéma russe, et, en général, du fait de voir des films en salles. Les salles fermaient, les unes après les autres, et le fait d’aller au cinéma était devenu quelque chose de rare. L'ouverture à Moscou de la première salle de cinéma au standard européen [« Kodak-Cinema World », ouverture le 17 octobre 1996 – Kinoglaz.fr], a été un événement grandiose. Et c’est à ce moment que nous avons essayé de nous remettre sur pieds. Aujourd'hui nous sommes une société anonyme dont cent pour cent des actions sont détenues par l'État, représenté par ROSIMUSHESTVO, agence gestionnaire de l'État.



En décembre 2008 ROSIMUSHESTVO a mis en vente les actions de SOVEXPORTFILM

En effet, l'étape suivante aurait pu être la vente de nos actions au privé. Dans notre pays, il n’y a pas de mécanismes législatifs ni de barrières protégeant une entreprise privatisée du changement de type d’activité. Si une entreprise, y compris liée au cinéma, est vendue, l'État ne peut rien faire pour empêcher par exemple qu’on ferme un studio et construise à sa place un hôtel ou un centre commercial. Et bien que tout le monde appelle à la prudence lors des privatisations d’entreprises de la culture et demande de ne pas se précipiter, des tentatives de vente ont lieu constamment. Cela a été le cas des Studios Lenfilm et, un an auparavant, des Studios Gorki. La même chose nous est arrivée. Même si tout le monde reconnait que la promotion des films nationaux, particulièrement lorsque l’industrie cinématographique commence à renaître, devrait revenir à l'État. Mais voilà, le 31 décembre 2008, nos actions ont été proposées à la vente. Nous avons appris cela seulement le 13 janvier puisqu’il n’y a eu aucune information sur le site de ROSIMUSHESTVO pendant les vacances de fin d’année. Je suis reconnaissant à tous les cinéastes, car, dès que l’information s’est propagée, on a commencé à m’appeler. Tous nos réalisateurs, acteurs et fonctionnaires ont commencé à téléphoner, y compris les médias. Quelques très grands réalisateurs ont écrit une lettre au Ministre de la Culture et au Premier Ministre. Serguei Soloviev était à ce moment-là aux USA, Pavel Lounguine en Inde, mais tout le monde m’a appelé, en exprimant son soutien et en demandant ce qu’il convenait de faire. Parce que ce sont des gens qui nous connaissent. Nous avons travaillé avec leurs films, et même à l’époque la plus difficile, nous ne les avons jamais perdus de vue. Et voilà que grâce à leurs efforts, nous avons été défendus. Au dernier moment nos actions ont été retirées de la vente.



Il y a quelque temps, on pouvait lire dans la presse que, selon le vice-ministre de la culture Alexandre Goloutva, le gouvernement avait chargé le Ministère de la Culture russe de la création, sur la base de SOVEXPORTFILM, d’un organisme non commercial destiné à la promotion du cinéma russe à l'étranger

Actuellement on est en train de transformer SOVEXPORTFILM en structure non commerciale. Pour l’instant, on ne sait pas encore quelle sera sa forme juridique : un fonds ou une société à but non lucratif. Mais ce sera une structure créée sur le modèle d’UNIFRANCE. Son activité ne comportera pas de composante commerciale, ce qui est bien. L’entreprise ne représentera pas les intérêts de quelqu’un en particulier mais de tout le monde. Il s’agira d’une activité non commerciale ayant pour objet la promotion des films russes à l'étranger.

J'ai lu sur KINOGLAZ.fr votre interview de Joël Chapron. C’est quelqu’un que j’apprécie et que je respecte. C'est aussi un ami de longue date et je le considère comme l’un des meilleurs spécialistes français du cinéma russe. Parfois j’apprends même des choses grâce à lui. Il arrive que je lui conseille un film mais le plus souvent c’est lui qui m’en conseille un.
Mais je trouve sincèrement que Joël fait une erreur lorsqu’il exprime sa crainte de voir cette future société comme un bras armé de l’Etat et qu’à ce titre, l’Etat aurait une influence sur le travail de promotion des films. On peut avoir cette crainte vu de l’extérieur. Mais je connais très bien la situation car j’ai travaillé à SOVEXPORTFILM toute ma vie, depuis 1975. Il se trouve que je connais tous les aspects internes, aussi bien économiques que politiques. Et je dois dire que ces dernières années je n'ai senti, aussi étrange que cela puisse paraître, ni de pression de la part de l’Etat, ni même d’intérêt pour savoir avec quels films nous travaillons. Jamais. Peut-être n’avait-on pas le temps de s’occuper de nous, ou peut-être nous faisait-on tout simplement confiance. C’est ça la réalité. Et même si cela peut vous étonner, si vous me demandiez maintenant s'il y a une participation de l'État dans la production de tel ou tel film que nous montrons à l'étranger, je vous répondrais que je n’en sais rien.
J'apprends cela par hasard, le producteur me le raconte en tant qu’ami, ou je l’apprends d’une autre façon. Mais cela ne m'intéresse pas vraiment parce que cela n'a pas d’importance et cela n'a aucun impact sur la programmation de nos festivals à l'étranger. Donc personne n’essaie de m'influencer, ni le producteur qui peut être mon ami, ni les réalisateurs…

Bien évidemment que nous ne perdons pas de vue les réalisateurs avec lesquels nous avons déjà travaillé. Ce ne sont pas forcément des noms connus. Il y a de jeunes réalisateurs. Le nom qui me vient à l’esprit maintenant est Oksana Bychkova. Son film Piter FM a été l’un des meilleurs films de ces dernières années en Russie et, ce qui est important, c'est l’un des rares films positifs, clair et bon dans son esprit. Le film d'Anna Melikian, L’Ondine, a très bien marché et nous attendons bien sûr son prochain projet. Et encore, je ne cite pas des noms très connus. Mais dans tout cela, il n'y a aucune composante politique ou économique qui aurait pu nous influencer et par composante économique je veux dire que la participation de l'État à la production du film ne nous a jamais intéressés.

En Union Soviétique on pouvait cumuler le travail commercial, c'est-à-dire la vente des films, avec l’activité non commerciale. Tous les films appartenaient à l'État et le problème du conflit d’intérêts ne se posait pas. Mais si le futur SOVEXPORTFILM réserve un traitement préférentiel à un film, au détriment d’un autre, ce sera incorrect.



Comment se fait la sélection des films quand vous organisez les semaines du cinéma russe, par exemple à Londres? Autant que je sache, UNIFRANCE choisit pour ses Festivals de cinéma français des films qui on été achetés en Russie, en aidant de cette façon les distributeurs dans leur travail de promotion.

Dans notre cas, la situation est un peu plus compliquée. D’ailleurs, nous ne savons pas encore comment nous allons faire cette année à Londres, car la crise nous a aussi touchés et nous sommes obligés de réduire nos actions. L'année dernière le rayon d’action de nos manifestations a été très large: les pays d’Europe Centrale : République Tchèque, Slovaquie, Hongrie, puis l'Allemagne, la France, l'Autriche, la Grande-Bretagne. Nous avons aussi organisé des manifestations dans quelques pays arabes, en Asie, en Amérique latine et en Amérique du Sud. En Inde les manifestations ont eu lieu dans 16 villes. Donc, on élargit constamment notre géographie. Cette année ce sera plus difficile, nous n’irons pas jusqu’en Amérique du Sud et je crains qu'il y ait aussi des problèmes avec la Grande-Bretagne. Et puisque notre cinéma ne se rentabilise pratiquement pas, nous faisons tout à nos frais, la location de la salle, etc. Parfois nous trouvons un partenaire dans le pays, parfois nous trouvons un sponsor, mais le plus souvent tout est aux frais de l’Etat.



Et est-ce que vos partenaires dans les différents pays vous suggèrent des choses, par exemple les films qu’ils souhaitent voir projetés chez eux ?

Dans certains pays oui, dans d’autres non. Parfois on me dit, qu’on a envie de voir des films avec la participation d’un acteur, par exemple Victor Soukhoroukov. En Inde on nous a demandé d’organiser la rétrospective de deux réalisateurs. Mikhalkov qui, en plus de deux films en production, était aussi très occupé par ses activités publiques, n’a pas pu y aller. Mais la rétrospective de Chakhnazarov, organisée dans l'État de Kerala tout au sud de l’Inde a été un grand succès. Ce qui m'a frappé, c’est que lorsque nous nous trouvions devant le cinéma pour donner une interview, il y avait une foule à l’extérieur. J’ai demandé pourquoi on ne laissait pas les gens entrer dans la salle. On m’a répondu, que la salle était sans doute déjà pleine. J’ai dit que ce n’était pas possible et qu’il fallait aller voir ce qui se passe car il y avait au moins trois cent personnes à l’entrée. Nous sommes entrés et effectivement, dans la salle, les 850 places étaient occupées.

Selon le cas, la sélection des films peut être faite différemment. Parfois nous le décidons, parfois nous donnons juste nos recommandations. Parfois la sélection se fait selon les conditions imposées par la censure, dans certains pays on nous fait confiance, dans d’autres non. En ce qui concerne le travail avec les films déjà achetés, je peux vous donner un exemple. Je ne savais pas que l’Ile de Pavel Lounguine avait été acheté par la société anglaise Artificial Eye. Il y a deux ans, nous avions inclus ce film dans le programme de notre festival. Nous nous sommes adressés au producteur pour la demande d’autorisation, il a nous a adressés au distributeur qui lui nous a dirigés vers Artificial Eye pour savoir si cela ne contrariait pas leur planning de sorties et leur travail par rapport à ce film. Nous avions prévu de montrer le film trois semaines avant sa sortie officielle. J’ai donc contacté moi-même les Anglais et je leur ai expliqué que nous amenions avec nous le réalisateur et les trois acteurs principaux, que nous allions organiser deux conférences de presse, qu’il y aurait plusieurs interviews avec Lounguine et les acteurs, et enfin, que nous nous occuperions des affiches, etc. Bien entendu, ils ont été contents de profiter d’une telle campagne publicitaire et ils ont donné leur accord. Mais ces cas sont rares, car en général notre cinéma se vend mal. Il arrive plus souvent la situation inverse c'est-à-dire que d’abord nous montrons le film et qu’ensuite il est acheté. Cela a été le cas en Inde, de même au Brésil, en Argentine et en Slovaquie. Construire le programme à partir d’une feuille blanche est parfois plus facile.

Autrefois SOVEXPORTFILM avait des représentations dans plus de 70 pays. Nous avions nos propres salles à Paris, Helsinki, au Caire. En Inde – j’y ai travaillé de 1986 à 1992 – nous louions sur du long terme 75 cinémas, que nous occupions entre 6 et 24 semaines par an. En fait, nous y jouions le rôle d’exploitant et nous sortions nos films nous-mêmes en salles. En Inde il est très difficile de sortir un film, la production nationale est énorme et, par conséquent, pratiquement un tiers des films indiens ne sort pas en salles car il n’y a pas assez de salles pour tous les films. Mais grâce au procédé que nous avions imaginé, c’est-à-dire louer les cinémas d’avance, nous réussissions à montrer nos films.



Aujourd’hui, la société Interfest s’occupe de la promotion du cinéma russe dans le monde, les studios Mosfilm organisent les projections de leurs films, le festival Kinotavr a également une activité à l’international. Pensez-vous que vous pourrez regagner votre position, peut-être pas comme monopole, mais au moins comme l’un des acteurs les plus importants dans la promotion du cinéma russe à l’étranger ?

Aujourd’hui, en dehors de l’organisation de nos propres festivals, nous soutenons la participation des films russes aux évènements culturels dans le monde. Lorsqu’un film russe reçoit une invitation à un festival, nous sommes chargés d’assurer sa participation. Nous nous mettons en contact avec le producteur, nous aidons à tirer une copie du film, à faire les sous-titres, nous assurons la publicité, nous aidons à envoyer le film au festival, nous organisons le voyage de l’équipe de tournage et nous prenons les billets d’avion. C’est-à-dire nous nous occupons de tout cela. Il y a chez nous des gens qui connaissent ce travail de A à Z. Et si quelqu’un veut aussi faire la même chose, il est le bienvenu. Aujourd’hui, nos capacités ne nous permettent pas de tout faire, franchement nous sommes surchargés. Il y a de plus en plus de travail et notre équipe n’est pas très grande, même si les gens sont très expérimentés. Aujourd’hui, cela ne vaut peut-être pas la peine d’élargir l’activité car il faut d’abord voir ce qui va se passer. Si effectivement une nouvelle structure est créée, alors bien entendu, les événements organisés par les autres devront être financés par de l’argent privé. En effet, pourquoi l’Etat aurait-t-il besoin de créer une nouvelle structure, si parallèlement, il devait financer aussi quelqu’un d’autre ? Les événements financés par les sponsors et l’argent privé peuvent être organisés sans nous. Mais si c’est l’Etat qui s’occupe de cela en créant une structure spécialisée, alors il est évident que seule cette structure devra être financée.

Dans son interview, Joël exprime ses craintes au sujet de l’influence de l’Etat mais ce qui est important pour moi, c’est que la nouvelle structure soit indépendante de toutes les sociétés actives dans le domaine du cinéma. Si parallèlement à l’Etat, l’autre cofondateur est une grande banque, une société de financement, de construction, cela peut être compatible avec nos statuts. Par contre, ce serait une erreur de permettre à une société cinématographique de devenir cofondateur car cela repousserait les autres. Comme l’a justement remarqué Joël, il faudra gagner la confiance de toute la communauté cinématographique. Nous sommes sur une niche, avec des activités très précises : c’est l’activité à l’international. Et si nous voulons que quelqu’un nous confie ses films et fasse des projets avec nous, alors il nous faut avoir la même distance avec tout le monde, et aucun engagement avec personne. Je veux souligner cette phrase car je pense que le vrai danger est là.



Le budget d’Unifrance se situe à environ 8 à 9 millions d’EUROS. Allez-vous disposer d’un budget identique ?

Pendant la première phase, l’Etat pourra sans doute assurer le financement de notre activité. J’imagine que les sponsors ne vont pas se précipiter vers nous immédiatement. Et les sociétés de cinéma qui auraient pu participer au financement de notre activité ne sont pas aujourd’hui au meilleur de leur forme car la crise a touché tout le monde. Mais l’Etat est tout à fait capable d’assurer. Il n’y aura pas d’investissements supplémentaires. Au moins lors des deux prochaines années, l’Etat investira autant qu’ aujourd’hui, cela suffira.

Aujourd’hui, l’argent part dans différentes directions. Il faut donc le concentrer et lancer les projets à partir d’un seul QG. Vous connaissez notre système d’appel d’offres. Ainsi, si nous gagnons un appel d’offres pour organiser un festival dans un pays, nous essayons évidemment de minimiser nos dépenses, par exemple, en faisant en sorte de montrer également les films dans les pays voisins. Grâce à cela, nous réalisons des économies sur le tirage des copies, les dépenses de transport, etc. L’année dernière, nous avons organisé un festival dans plusieurs pays arabes et, bien évidemment, nous avons fait voyager les mêmes copies.



Cette année, vous étiez pour la deuxième fois, l’organisateur du Pavillon russe à Cannes. Quel est le bilan du travail au Pavillon russe ?

Si, l’année dernière, nous avions des sentiments mitigés et étions simplement contents d’avoir organisé le Pavillon, tout en étant conscient d’avoir fait une bonne chose, alors, cette année, nous avons été bien davantage satisfaits du résultat, notre but principal ayant été atteint : le Pavillon était constamment rempli.
Le lendemain de l’ouverture, je me suis rendu chez nos partenaires américains, car nous voulons organiser un festival à San Francisco. Depuis leur balcon, on pouvait voir notre Pavillon. Ils m’ont dit qu’ils avaient pu constater, depuis leur balcon, qu’il était toujours rempli et ils étaient admiratifs. C’était agréable, on voyait le drapeau russe. Après avoir discuté avec eux, je me suis décidé de retourner dans notre Pavillon bien qu’il soit déjà tard, 8 heures du soir. Je me suis approché de la porte, elle était fermée. Normal, il était tard. J’étais sur le point de partir, mais j’avais l’impression qu’à l’intérieur il y avait du monde. Sur le côté se trouvait une très grande terrasse sur laquelle une trentaine de personnes étaient en train de discuter. Les uns étaient en négociation, les autres se rencontraient tout simplement. Le Pavillon était déjà fermé, seule la terrasse était ouverte. On m’a vu et on m’a demandé comment il était possible que le Pavillon soit déjà fermé. A partir du troisième jour, nous avons travaillé jusqu’à tard dans la nuit. Nous étions présents et organisions des rencontres. Nous avons organisé des événements qui ont connu un certain succès. L’important pour moi, c’est bien sûr de les avoir organisés, mais surtout que tant de monde soit venu et que la presse en ait fait un écho positif, que tout le monde ait assisté avec plaisir aux conférences de presse, celle de Lounguine et celle de Khomeriki, et que tous aient été contents. C’était la maison russe, non seulement pour les cinéastes russes, mais aussi parce qu’on pouvait y obtenir n’importe quelle information ou renseignement. Et lorsqu’on y était venu une fois, on y revenait encore.